29.10.14

29 octobre

Ma chère épouse
Je m'empresse de t'écrire comme je te l'ai promis, et aussi pour faire réponse à ta lettre que j'ai reçue ce matin et qui m'a fait tant plaisir. Moi aussi ma chère Alice, j'aime bien parler avec toi, si je ne le puis de vive voix, je le fait par correspondance car je sais que tu aimes bien comme moi recevoir des nouvelles surtout de ton petit mari dont tu te mets tant en peine de lui. Je comprends bien ta tristesse ma chérie, si tu ne m'aimais pas, tu ne te tourmenterais pas à ce point ; mais prend courage mon trésor, le jour viendra où nous nous reverrons ainsi que tous les parents. Comme me le dit Germaine sur une carte que j'ai encore reçue d'elle aujourd'hui : quelle fête ce sera lorsque je serai de retour parmi vous, et surtout pour revoir les êtres qui me seront chers. Ah oui ma chérie, je suis comme toi : je l'attend ce jour qui nous rendra heureux tous les deux, mais prenons patience et tranquillise-toi un peu pour moi, je ne suis pas si malheureux que tu te le penses. D'abord pour les corvées, je n'en fait point, car c'est moi qui sert à table les hommes, et puis aussi je fais le truc du sergent de demi-section, et un peu aussi de Joseph Priquet. Je suis bien tranquille vis à vis des autres ; aussi je fais tout mon possible pour contenter tout le monde et pendant ce service là, le temps se passe un peu.
Chère bien aimée, tu me dis aussi que Mesdames Perret sont revenues à Salins et qu'elles t'ont chargée de bien des choses de leur part. Je l'ai en remercie à toi, je serai bien heureux de leur dire de vive voix lorsque nous serons rentrés à Salins dans notre heureux logement ; avec notre cher petit ange qui grandira avec gentillesse pour sa maman et son papa, et où il commencera son babillage et ses premiers pas, et où nous serons si heureux les deux.
Chère Alice, tu me dis que Germaine t'a fait don du bien de berceau pour notre chérubin. Tu la remercieras bien pour moi, en attendant que je lui fasse réponse. Elle doit être contente d'être bientot marraine, et je crois qu'elle sera heureuse aussi car elle doit bien aimer ces petits êtres qui sont la richesse des parents et le fruit des amours comme pour nous deux. Je te joins la transcription dont je t'ai promis, tu demanderas au parrain si c'est utile de le faire, car ce serait pour demander l'allocation pour lui pendant que je serai encore ici. S'il ne fait qu'avoir un mois, c'est toujours autant car j'ai toujours l'espérance d'être de retour pour Noël ou le jour de l'an. Si toutefois tu n'as pas reçu satisfaction d'après la lettre que je t'ai envoyée du Maire de Salins, tu me le feras savoir, et je m'adresserai ailleurs car nous avons droit mieux que bien d'autres. Il ne doit pas y avoir là de préférence, je suis aussi sous les drapeaux, et toi tu dois recevoir pour vivre pendant mon absence.

Embrasse bien tous les parents pour moi et dis bien des choses pour moi à la maman à qui je pense bien souvent, qui va avoir bien du travail. Enfin je prends patience car j'espère bien pouvoir lui rendre tout ce qu'elle fait et fera encore pour toi pendant que je suis ici. Je ne l'oublierai jamais, tu peux lui certifier ;  et toi mon trésor, fais toujours bien attention à toi, ne va pas commettre d'imprudence : ne pas te lever trop après l'accouchement, ni essayer de te peigner. J'en aurais le coeur trop gros si j'apprenais qu'il t'arrive quelque chose, car je suis certain que tout veut bien aller pour toi, je prévois les choses d'après tes dires.

Je termine ma lettre en vous embrassant tous bien fort comme je vous aime. Et toi ma chère Alice bien aimée, reçois les meilleurs amitiés de ton petit mari qui t'aime pour la vie.
Ton Léon qui t'embrasse bien fort

Léon

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