22.12.14

22 décembre

Chère Alice et chère petite Marie,

Je m'empresse de faire réponse à ta lettre du 18 courant que j'ai reçue hier au soir, ainsi qu'une lettre de Germaine. Je suis heureux de savoir mon enfant chérie baptisée mais je serai encore bien plus heureux le jour où je pourrai vous serrer dans mes bras et vous couvrir de baisers brulants. Que ce petit ange de cette terre me porte bonheur pour que je puisse la connaitre et bien l'élever. J'ai toujours la ferme espérance de mon retour, mais le destin me sera-t'il favorable ? J'avais des amis intimes qui parlaient de l'avenir, et hélas, qui ne sont plus. J'implore tous les soirs le Très-Haut qu'il me fasse la grâce de revoir ma petite famille et de bien l'élever mon enfant ; enfin, espérons que pareil malheur ne t'arrivera pas et que je serai rendu à ta tendresse.
Chère bien aimée, tout ce que tu as fait pour le baptême est bien, je suis bien content de toi, tu as bien fait pour M. le Curé de St Maurice, et aussi pour M. le Curé Bailly, ainsi que pour M. et Mme Blandin. Moi, si j'ai le bonheur de rentrer, je serai heureux d'en avoir aussi mais d'ici là ils seront vieux, ce sera comme le vin : plus il est vieux, meilleur il est.
J'ai écrit à Germaine en même temps qu'à toi mais j'ai oublié une chose : c'est de la remercier de ce qu'elle a donné pour notre chérie. Si tu la vois bientôt, remercie la bien pour moi en attendant que je lui réécrive. Je ne puis le faire maintenant car la lettre est cachetée. N'oublie pas cela ma chérie, car elle pourrait mal me juger. Je te remercie bien des bonjours de M. le Curé de St Maurice et de M. et Mme Bourgeois. Lorsque tu les reverras, tu leur donneras aussi le bonjour de ma part, ainsi qu'aux amis et connaissances.
J'ai écrit à Eugène et à Alfred il y a quelques jours. Ils seront contents d'avoir de mes nouvelles comme moi d'en avoir des leurs. J'ai reçu une lettre d'Albert il y a quelques jours. Il va bien aussi, il était en souci de moi car dans sa compagnie il y en a qui avaient reçu des nouvelles du 244ème où on lui avait dit que mon régiment avait été bien éprouvé. Je ne comprends pas ces porteurs de fausses nouvelles qui parlent de pareils faits pour ce qu'il y a eu, il est vrai que c'est bien de trop mais il est nullement besoin d'en faire un journal. Il se porte bien aussi, moi de mon côté je suis un peu souffrant car l'on nous a vaccinés contre la fièvre typhoïde et ça me travaille encore assez ; enfin tranquillise-toi là dessus, c'est encore l'affaire de quelques jours et tout ira bien. Je ne me fait pas de mauvais sang, c'est l'essentiel. Je vis au jour le jour dans l'espérance de mon retour vers mes trésors bien aimés et parents qui sont si bons pour moi. 
Embrasse bien pour moi cette chère maman ainsi qu'Edmond, d'avoir une si gentille petite nièce et filleule. Il me semble l'avoir vue cette petite chérie le jour de son baptême, enfin vivement, si cet heureux jour doit venir, qu'il me fasse voir notre bonheur.
Chère bien aimée, tranquillise-toi toujours bien pour moi : vis en bonne espérance ; nous sommes en repos pour une dizaine de jours, nous avons encore 5 jours à nous reposer et après nous reprenons le service comme auparavant : je crois que le lieutenant Pernet restera à la compagnie car on lui a envoyé un cheval comme Commandant de compagnie. L'on est bien plus heureux avec lui qu'avec le capitaine qu'on avait avant. Je ne vois plus d'autres choses à te dire, je termine ma lettre car je vais aller me reposer un moment.
Reçois ma chérie, ainsi que chère petite Marie, mes plus tendres amitiés, et soyez toutes deux bien embrassées comme je vous aime pour la vie.
Ton Léon
Encore mille bons baisers. 
Courage et patience dans l'avenir.

Certificat de baptême et de communion solennelle de Marie

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